Fabien Roussel exige que toute la vérité soit faite et demande une journée d’hommage pour les victimes des crimes du colonialisme

Fabien Roussel exige que toute la vérité soit faite et demande une journée d’hommage pour les victimes des crimes du colonialisme

Vous trouverez ici 17 octobre 1961 la déclaration de Fabien Roussel

Il y a 60 ans, au soir du 17 octobre 1961, des dizaines de milliers d’Algériens — hommes, femmes, enfants, anciens — manifestent pacifiquement à Paris.

Venus des bidonvilles et des garnis où ils sont relégués, ils se sont mobilisés contre la ségrégation raciste et le couvre-feu qui leur est imposé du soir au petit matin. 

La sale guerre coloniale d’Algérie se livre alors jusque dans nos villes. Les Algériens de France se voient soumis aux rafles, aux tortures, aux internements arbitraires, aux violences aveugles. Et chaque matin, à l’époque, on repêche des cadavres dans la Seine.

Ce 17 octobre, alors qu’ont commencé les négociations qui vont mener à l’indépendance de l’Algérie quelques mois plus tard, c’est une effroyable attaque policière que subissent les trois cortèges, énormes et dignes, qui convergent vers le centre de la capitale. 

Les historiens considèrent aujourd’hui qu’il s’agit de la répression la plus sanglante qu’ait connue une manifestation, dans l’histoire moderne de l’Europe occidentale.

Cette soirée fera des centaines et des centaines de morts, de blessés graves, de disparus. 

La violence d’unités policières largement infiltrées par l’extrême droite se poursuivra les jours suivants. 

Et elle aboutira à une autre tuerie, cinq mois plus tard, le 8 février 1962, au cours de laquelle neuf communistes et militants syndicalistes manifestant contre le colonialisme et le fascisme seront tués, au métro Charonne à Paris.

Le responsable de ces assassinats de masse s’appelle Papon. Le même que des associations courageuses seront parvenues, bien plus tard et au prix d’années d’efforts, à faire condamner pour complicité de crime contre l’humanité en raison de sa participation à l’entreprise nazie d’extermination des Juifs.

Des historiens ont maintenant établi que cet infâme personnage s’est inspiré, comme préfet de police de Paris, des méthodes qu’il avait utilisées, pour le compte du régime de Vichy, contre la population juive de Bordeaux. 

Pourtant, ni lui, ni le gouvernement d’alors n’auront ensuite fait l’objet de poursuites. Tout aura même été fait pour occulter les massacres sauvages de 1961. 

Durant ces heures bien sombres, les communistes étaient aux côtés du peuple algérien luttant pour son droit à déterminer librement son destin.

 

Soixante ans plus tard, alors que certains s’emploient à réviser l’histoire, et qu’ils distillent le poison de la haine xénophobe dans les esprits, le combat continue pour l’amitié entre les peuples, pour la fraternité humaine.

Et c’est au nom de cette même solidarité que nous sommes pleinement aux côtés du peuple frère algérien, des forces progressistes algériennes et du mouvement Hirak qui, depuis des mois, se bat courageusement pour la démocratie et pour de profonds changements institutionnels en Algérie.

En ce jour anniversaire, les victimes d’octobre 1961, leurs familles et le peuple algérien ont droit à la verité.

Le peuple français a droit de savoir quelles atrocités ont été commises en son nom. 

 

C’est pourquoi, je demande au président de la République de répondre aux attentes légitimes.

Comme l’a fait votre prédécesseur Jacques Chirac à propos de la rafle du Vel-d’Hiv, comme l’a fait la France en reconnaissant l’assassinat de Maurice Audin par l’armée française, je demande que la France assume ses responsabilités et déclare solennellement que l’institution policière française, des hauts fonctionnaires français, des responsables politiques français se sont rendus coupables d’un crime d’État il y a 60 ans, et quI ont ainsi déshonoré la République.

Je demande que soit désignée une commission d’enquête indépendante, qui aura accès à toutes les archives officielles et à tous les témoignages sans exception, afin de faire toute la lumière sur la terreur coloniale dont ont été victimes les Algériens de France.

Je demande qu’un lieu soit consacré à Paris aux événements d’octobre 1961, conformément au vote du Sénat en octobre 2012. 

Je demande de faire de la date du 17 octobre 161, une journée d’hommage aux victimes des crimes du colonialisme plutôt que de parler d’une « rente mémorielle » vécue comme une insulte par le peuple algérien.

 

C’est ainsi, dans la vérité, dans la sincérité, dans la fraternité, que l’on permettra aux mémoires de la nation algérienne et de la nation française de s’accorder enfin.

 

Fabien Roussel, secrétaire national du PCF, candidat à la Présidence de la République,